Bonjour à tous,
Voici des nouvelles de notre passage express au Maroc.
CHAPITRE 1 : NAVIGATION ENTRE LES CANARIES ET DAKHLA (Maroc)
Après quelques heures passées à Gran Tarajal avec l'équipage de Cirrus, Maud et Jérémie, qui nous ont rattrapés après une course poursuite de plusieurs semaines, nous sommes partis lundi 24 novembre au soir pour le Sahara occidental.
La navigation restera marquée par notre pêche miraculeuse : 3 dorades de tailles impressionnantes qui trouvent le moyen de s'échapper lorsqu'on les remonte à bord au grand désespoir du capitaine qui est finalement récompensé par la pêche d'une bonite rayée qui finit dans nos seaux puis notre estomac et non l'inverse (grosse victoire contre le mal de mer qui m'a une fois accompagnée pendant les premiers jours de traversée). Le poisson est tellement grand que nous le dégustons sous toutes les formes - steak, filets, rillettes - et en gardons une partie en conserves... Ce n'est pas seulement un heureux hasard ! les côtes du Sahara occidental sont mondialement réputées pour la pêche.
Session improvisée de zumba pour rester en forme |
Les quarts de nuit sont animés puisque nous sommes entourés de cargos et bateaux de pêche. Il est magnifique de naviguer sous les étoiles avec toutes les lumières des bateaux qui scintillent mais il nous faut rester bien vigilants et ne pas somnoler à moitié pendant nos quarts ce qui, nous l'avouons, nous arrive parfois lorsque le temps s'y prête.
CHAPITRE 2 : ARRIVEE AU PORT DE PECHE DE DAKHLA
Jeudi 27, le jour se lève et petit à petit nous apercevons les dunes de sable. De l'infiniment plat qui nous change des volcans des canaries. Les pêcheurs nous saluent d'un "bienvenue au Maroc". En entrant dans le chenal, un petit bateau avec 3 hommes à son bord s'approche à grande vitesse de Django. Ses occupants nous saluent en riant et brandissent fièrement un poulpe qu'ils envoient dans notre cockpit. A peine le temps de les remercier qu'ils sont déjà repartis.
Nous nous signalons à la VHF et ne savons pas trop où il faut nous stationner pour les formalités. Il vaut mieux ne pas trop s'aventurer au hasard car la lagune est une immense réserve naturelle mais aussi une zone militaire et on ne peut s'aventurer au-delà du port de pêche qu'avec une autorisation de l'armée royale marocaine. L'équipe du port nous guide : suivez le sardinier qui se trouve à vos côtés puis mettez vous à couple du bateau pilote. C'est parti ! Ni une ni deux nous voici amarrés au milieu des énormes sardiniers et véritables attraction locale, le nombre de voiliers venant faire escale à Dakhla étant relativement faible... Environ 30 secondes après avoir attaché Django, il se retrouve assiégé par 4 hommes endimanchés, cordiaux et efficaces. Nous ne comprenons pas trop qui fait quoi mais il y a semble-t-il les représentants de la marine royale, des douanes, des autorités sanitaires et du port. Ils s'installent à bord de Django, prennent des photos des papiers officiels, nous font remplir sur une feuille de papier une attestation selon laquelle nous n'avons "ni arme, ni animaux, ni passagers, ni drogue". "Vous avez une photocopieuse à bord ? Il faut ce document pour les autorités sanitaires mais aussi les douanes". "Ah non... mais ce n'est pas un problème, nous allons l'écrire en double exemplaire". On nous demande en guise de signature d'apposer notre cachet. "Comment vous êtes français et vous n'avez pas de cachet ?". Quelques minutes plus tard tout ce monde quitte le navire. Le représentant des autorités sanitaires avec lequel nous avons le plus discuté, les autres ayant hâtivement quitté le navire pour cause de mal de mer, nous salue en nous souhaitant de revenir la prochaine fois au Maroc avec un bateau plus grand !
Nous larguons les amarres pour mouiller quelques mètres plus loin comme prévu depuis le début. On commence à partir quand nous sommes alpagués par la police : "et moi ? je dois tamponner vos passeports et vous poser des questions !" C'est reparti pour un tour, on s'amarre à nouveau au bateau pilote. Après avoir répondu à quelques questions, Olivier repart avec le policier et son adjoint en voiture pour faire tamponner les passeports tandis que je veille sur le bateau.
Au mouillage au milieu de ce port de pêche, nous vivons une expérience originale et mémorable : nous sommes l'unique voilier, à côté de centaines d'immenses sardiniers. Le bruit des centaines de pêcheurs qui travaillent nuit et jour s'allie à une puissante odeur de poissons et vapeurs de gazoil. Lorsque nous accostons avec notre petite annexe, nous sommes immédiatement entourés de dizaines de pêcheurs intrigués. Mohammed, de l'équipe de gardiennage, nous accueille avec un grand sourire et nous propose de surveiller notre annexe pendant que nous partons découvrir Dakhla après nous avoir souhaité "bienvenue, bonne chance, bon séjour, bon appétit, bonne nuit, bon voyage, bonne mer et bon vent" ! Pour nous rendre en ville, nous devons prendre un taxi (10 minutes - 15 dirhams) et passer un barrage de police qui sépare le port de pêche de la ville. Nous comprendrons assez vite que la zone est très militarisée.
Dakhla est une ville est pleine ébullition, notamment à la tombée du jour où toute la ville semble s'animer davantage. L'ambiance africaine s'y fait pleinement ressentir, la rue est envahie par des vendeurs de vêtements, cigarettes, fruits, poissons etc. Les femmes voilées se rassemblent dans les squares et places publiques pour surveiller leurs enfants et discuter entre elles. Les terrasses sont occupées par des hommes qui semblent plongés dans d'interminables discussions où passionés par les matchs de la FIFA. Le marché est très propre, de beaux étals de poisson, de viande et de fruits secs s'enchaînent et ouvrent l'apétit quand on s'y promène. On sent que la ville est en transition vers un développement de son tourisme mais l'ambiance y reste pour l'instant très authentique.
A notre retour de la ville, pour rejoindre le bateau, nous devons porter l'annexe un long moment et la descendre, de nuit, au milieu des rochers glissants. Nous nous demandons comment nous allons pouvoir procéder lorsque à nouveau des pêcheurs se précipitent à notre secours. Je m'apprête à lever un côté de l'annexe lorsqu'un marocain prend immédiatement ma place. Etant une femme, j'ai interdiction de porter et j'avoue que cela m'arrange un peu ! En quelques secondes, l'annexe est à l'eau.
CHAPITRE 3 : MOUILLAGE DEVANT LE CENTRE VILLE DE DAKHLA
Le lendemain de notre arrivée nous partons en expédition pour obtenir une autorisation afin de nous ancrer devant la ville de Dakhla, plus précisément devant un hôtel (Bab Al Bahar), à seulement 3 kilomètres du port de pêche. Après nous être renseignés auprès du port et la marine royale, il semblerait qu'il nous faut un accord de la "Wilaya" (sorte de préfecture), puis une autorisation délivrée par la marine royale. On comprend surtout qu'il nous faut un "intermédiaire" sans quoi il y a de fortes chances que notre demande soit refusée. Après avoir discuté avec pas mal de monde, nous comprenons que cet intermédiaire pourrait être le directeur de l'hôtel de luxe Bab Al Bahar. Nous le rencontrons donc avant de nous rendre à la Wilaya. Là, on nous renvoie vers la police qui nous indique après plusieurs heures d'attente ne jamais avoir été sollicitée pour de telles autorisations. Nous retournons donc à la Wilaya qui s'avère fermée jusqu'à lundi. Le vent se lève, un coup de vent de sud-ouest est annoncé pour la nuit et les bateaux de pêche commencent à quitter le port pour aller mouiller dans la lagune car le port n'est pas bien abrité. Nous tentons, en dernier recours d'aller voir la marine royale de Dakhla pour obtenir une autorisation exceptionnelle compte tenu de la météo, et ce malgré le fait que nous n'avons toujours pas l'accord de la Wilaya. Le jeu de pistes se finit en beauté par un "oui" accordé à titre exceptionnel par le colonel en raison du coup de vent. Youhouuuuuuuu ! On fonce en taxi au bateau et on s'avance vers la ville au milieu des bateaux de pêche qui prennent aussi la poudre d'escampette. En allumant la VHF canal 16, nous tombons sur la prière du soir. Le vent a commencé à souffler et il était temps d'arriver. Fortes secousses au mouillage. Mais le capitaine, jamais à court de bonnes astuces, met deux ancres l'une derrière l'autre pour assurer le maintien du mouillage (empenneler) et hisse le tourmentin à l'arrière pour stabiliser le bateau.
Nous essaierons par la suite d'obtenir une autorisation pour remonter encore plus la lagune en bateau, vers la plage PK 25, mondialement réputée pour le kitesurf. Je vous passe toutes les péripéties qui nous ont finalement conduit devant le Wali (gouverneur en charge de la Wilaya). Ce dernier a l'honnêteté de nous traduire le discours que la marine royale nous tient depuis le début à savoir : "pour la marine royale, pas de problème, vous pourrez aller mouiller devant PK 25 mais il vous faut auparavant obtenir l'autorisation de la Wilaya". Le Wali nous explique que nous renvoyer vers d'autres administrations était une façon de refuser en douceur notre demande. Ahhhhhhhhh ! Il fallait le dire tout de suite, cela nous aurait évité de passer des heures à attendre et courir tous les bureaux ! Nous commençons à mieux comprendre le fonctionnement des administrations marocaines et nous finirons même par le connaître trop bien...
Après toutes ces aventures, nous sommes heureux de profiter de la ville, visiter les environs et rester tranquillement sur le bateau.
A Dakhla : nous visitons le marché, faisons le plein d'épices, de dattes et figues séchées, mangeons plus que de raison (couscous, tajines, steak de chameaux, pâtisseries accompagnés de thé)... Nous ne connaissons personnes mais tout le monde semble nous avoir repérés. Nous n'oublierons pas l'accueil des habitants qui nous couvrent de cadeaux (poulpes, pâtisseries, immense drapeau marocain pour Django...) et sont heureux de s'arrêter pour échanger avec nous.
Une excursion à la Sarga, à 5 kilomètres de Dakhla, nous mène dans une ville de pêcheurs très pauvre. Après les immenses bateaux de pêche du nouveau port, nous nous trouvons cette fois au milieu de centaines de petites embarcations avec 2 ou 3 pêcheurs à leur bord. A quelques mètres de là se trouvent des bidonvilles. Nous pourrions nous sentir mal à l'aise d'être venus jusqu'ici mais encore une fois les marocains nous y accueillent avec le sourire. Nous nous promenons entre les bateaux, apercevons des pêcheurs assis sur le sable échanger autour d'un thé, d'autres comparer leur pêche du jour. Nous rentrons à Dakhla, la tête pleine d'images fortes, entassés dans un taxi avec des pêcheurs.
Sur Django, Olivier plonge et s'amuse à taquiner un poulpe tandis que je tente de capter internet depuis le bateau après une rupture de tous les réseaux de communication du Sahara occidental (téléphone et internet) de plusieurs jours en raison du mauvais temps.
Feu notre annexe... |
CHAPITRE 4 : DARK DAKHLA, LE COTE OBSCUR DE L'ESCALE
Le séjour se poursuit très agréablement et, si nous étions partis le 1er décembre de Dakhla, nous en garderions seulement l'image d'un endroit très agréable. C'était sans compter sur la succession d’événements désagréables qui est venue noircir le tableau.
Dans la nuit 1er au 2 décembre, notre annexe disparaît, le bout qui la retenait au bateau ayant vraisemblablement été coupé au couteau. Nous entrons alors dans un cycle de malchance d'où nous sommes ressortis un peu démunis. Le 2 décembre au soir, nous tentons de regagner le bateau à la nage. Un fort courant empêche Olivier, qui porte les deux sacs étanches, de rejoindre le bateau. Un petit pêcheur sur une chambre à air vient à son secours et le déleste des sacs. Il fait mine dans un premier temps de venir vers le bateau avec les sacs. Olivier parvient à remonter à bord mais le pêcheur a pris la poudre d'escampette et nos affaires (passeports et papiers du bateau que nous avions pris pour déclarer le vol de notre annexe, cartes bancaires, ipad qui nous servait pour la navigation et que nous avions sur nous pour télécharger une météo, téléphones, appareil photo...).
Dans la nuit 1er au 2 décembre, notre annexe disparaît, le bout qui la retenait au bateau ayant vraisemblablement été coupé au couteau. Nous entrons alors dans un cycle de malchance d'où nous sommes ressortis un peu démunis. Le 2 décembre au soir, nous tentons de regagner le bateau à la nage. Un fort courant empêche Olivier, qui porte les deux sacs étanches, de rejoindre le bateau. Un petit pêcheur sur une chambre à air vient à son secours et le déleste des sacs. Il fait mine dans un premier temps de venir vers le bateau avec les sacs. Olivier parvient à remonter à bord mais le pêcheur a pris la poudre d'escampette et nos affaires (passeports et papiers du bateau que nous avions pris pour déclarer le vol de notre annexe, cartes bancaires, ipad qui nous servait pour la navigation et que nous avions sur nous pour télécharger une météo, téléphones, appareil photo...).
Étonnamment, le plus éprouvant n'est pas le vol car nous parvenons plus facilement en voyage qu'à terre à nous détacher du matériel. Le plus difficile a sans doute été le parcours du combattant administratif que nous avons subi avec le soutien infaillible de nos parents. Nous ne étendrons pas davantage sur le blog à ce sujet mais nous avons le sentiment, à la veille de notre départ pour Dakar, d'avoir vécu pour le prix d'un kitesurf, des émotions certainement bien plus riches, intenses et dignes d'enseignement que toutes vagues que nous aurions pu surfer si l'autorisation de nous rendre à PK 25 nous avait été donnée !!!! Les voyages forment la jeunesse et nous sommes à bonne école...
En conclusion, pour reprendre les mots de notre ami marocain Anas, avide de sages citations : "il y a deux choses importantes pour un homme : sa vie et son passeport. Il vous reste la vie".
C'est vrai et nous comptons bien en profiter. Départ prévu demain pour Dakar, inch'Allah !
Vous continuez votre voyage, encore plus forts et positifs, sans ce petit revers l'aventure n'aurait pas été complète quand vous la raconterez dans votre grand âge au coin du feu. Nous vous embrassons. Fabrice et Catherine
RépondreSupprimerDjango ne s'appelle pas Django pour rien ! Il se souviendra longtemps de cette balade au Sahara occidental, Dakhla aura tenu toutes ses promesses et toutes ces péripéties qui, comme vous le dites bien, valent bien plus qu'une leçon de surf, resteront gravés pour longtemps et vont vous servir pour la suite. Bon courage et bonne nav. au large !
RépondreSupprimerThierry et Catherine
Ha..... Le Maroc! Dépaysant ! non?... Nous sommes confus de vous lire ainsi en souffrance de ces quelques mésaventures. Nous espérons de tout cœur que vous trouvez le courage de continuer dans un esprit positif ce beau voyage, unique. Vous aurez bien d'autres galères ! alors concentrez vous sur l'essentiel, vous deux et votre bonheur. Trouver la force, chaque matin et chaque soir de continuer à avancer, encore un peu...plus loin. Si nous pouvons vous aidez (papiers, cartes numériques, guides nautiques, demandes d'autorisation, conseils pratique, recettes de cuisine, calembours, farces et attrape! ..... Bref, faites nous signe cela sera fait avec grand plaisir. Prenez grand soin l'un de l'autre et de votre monture. Rendez-vous de l'autre côté.
RépondreSupprimerAlicia & Morgan
Je suis heureux de voir enfin la balise à Dakar, j’espère que la traversée ne fut pas trop éprouvante?... reposez vous bien.
RépondreSupprimerbisous
Merci pour vos messages et commentaires via le blog, et les mails perso, ça nous réconforte et nous rebooste !! On est bien arrivé à Dakar et cette mésaventure nous a permis de faire connaissance avec la sympathique équipe du consulat français de Dakar. La traversée s'est bien passée, 4 jours au lieu de 6, avec des pointes à 11knts, plutôt sportif. Eh oui Django ne a pas que piano !
RépondreSupprimerOn vous donnera bientôt plus de nouvelles avec un nouvel article sur le blog et d'ici là on vous embrasse très fort !
Mathilde et Olivier
Salut les Loulous !
RépondreSupprimerExcellent !!! enfin votre première partie et non l'envers de la médaille. Curieusement, votre escale m'a rappelé celle du Guilvinec où l'on y retrouve ces couleurs vives, ces odeurs, ces bruits incessants....typique des ports de pêche ! Mais les analogies s'arrêtent là...
Faites un petit tour au Brésil, si vous adorez les circuits administratifs alambiqués. Vous ne serez pas déçu du voyage !
A bientôt,
Profitez-en bien, bon vent, belle mer !
Chers Mathilde et Olivier,
RépondreSupprimerMalgré mon silence, je pense très souvent à vous et vous souhaite une belle et heureuse année 2015.
J'ai enfin pris un peu de temps pour suivre vos aventures passionnantes et certainement très enrichissantes. Les photos sont superbes et vos commentaires au top.
Bonne continuation ! Je vous embrasse bien fort.
Odile